mes racines

Je suis née le vingt septembre 1932, à Perpignan, de Sabaté Marie, qui était née elle-même à Mont-Louis un quinze décembre 1904. Ils étaient huit frères et sœurs ; la vie n’était pas très facile pour eux. Le père était tailleur de pierre, et il est mort très jeune.

Il faisait partie d’une « cobla », orchestre traditionnel catalan, avec son frère et son père. C’était la « cobla Sabaté-Surjus ».

 

C’est ma grand-mère, petite et frêle, qui est arrivée à élever toute seule cette nombreuse famille.

Elle a ouvert une sorte de taverne, où les ouvriers venaient prendre leurs repas ; il y avait aussi des militaires car Mont-Louis était une ville de garnison. Les hivers surtout étaient rudes.

Ma mère racontait souvent qu’ils étaient obligés de sortir par la fenêtre du premier étage, tant il y avait de neige, et qu’il fallait porter sa bûche à l’école pour chauffer. Elle a quand même eu son certificat d’étude, ce qui à cette époque là était très bien.

Mon père, François Anglès, était né en Espagne un trois octobre 1905, à Càlig, petit village au sud de Barcelone. Il avait deux frères et deux sœurs.

 

Bien des années plus tard, en 1988, Jean, moi-même et son petit fils Philippe, l’avons accompagné à Càlig revoir sa maison natale, il n’y était pas retourné depuis son enfance.

En effet, mon grand-père était républicain, et il a dû s’exiler en France, mon père avait alors cinq ou six ans et il avait perdu sa mère très jeune. Ils se sont installés à Estagel, où mon grand-père travaillait dans une exploitation viticole. Une de ses filles, Carmen, les avait suivis pour s’occuper d’eux. Ensuite mon père a été placé en apprentissage chez un maréchal-ferrant. Puis chez un boulanger à Torreilles, puis à Perpignan.

Ma mère, de son côté, après son certificat d’étude, a été placée comme bonne dans une maison bourgeoise de Perpignan « les Créange » ; elle y est restée pas mal d’années.

C’est à cette époque qu’elle a fait la connaissance de mon père … au bal, lui qui ne savait pas trop danser.

Ils ont fini par se marier.

Mon père, qui était rouge et anticlérical, a exigé que ce soit un mariage civil ; ce qui n’a pas trop plu à ma grand-mère. Cela s’est passé dans la plus stricte intimité, ils ont quand même fait un petit voyage de noces à Toulouse, à l’hôtel de la Poste.

Ensuite, ils ont acheté une boulangerie qui était fermée pour cause de faillite avec leurs économies, et là, se sont mis à travailler d’arrache-pied, ne comptant pas les heures, ils ont finalement petit à petit remonté ce commerce et fait une belle clientèle.

C’est dans cette boulangerie que j’ai vu le jour un an après leur mariage.