les filles arrivent

Nelly est née le 26 mai 1953, à 9 heures… même pas un an après notre mariage.

Elle pesait 4 kg 100, c’était un beau bébé ; la sage-femme me l’a mise dans les bras, et j’ai regardé, toute étonnée, ma fille, qui avait l’air d’une petite chinoise ! Je ne réalisais pas très bien.

Les premiers jours, elle pleurait beaucoup, je ne voulais pas qu’on la prenne et qu’on la berce… mais nous avons dû capituler, car personne ne pouvait dormir !

Nous sommes restés plus d’un an chez les parents.

Puis, mon père ayant acheté une boulangerie, rue Grande la Réal, il a installé Marcelle et Joseph comme gérants, ce qui a libéré la petite villa qu’ils occupaient, et nous sommes allés nous installer là-bas.

Heureux ! Avec les économies que nous avions faites pendant l’année, nous avons pu nous acheter une belle chambre !

Mais j’étais déjà enceinte de Chantal et très fatiguée. J’ai quand même continué à aller faire le ménage chez mes parents ; la vie était difficile pour nous à cette période là, mais nous avons tenu le coup !

Ma cousine Carmen s’est mariée le 30 septembre, et Chantal a eu l’heureuse idée de naître le 29, ce qui m’a évité d’aller à la noce, car j’étais vraiment énorme et n’avais rien à me mettre !

L’accouchement pour Chantal a aussi été très rapide ; Jean allait partir au travail quand j’ai commencé à avoir des douleurs. Il a appelé une voisine, est allé prévenir mon père, qui était en train d’enfourner et n’a pas pu venir, c’est monsieur Sérina qui m’a conduite à la clinique, direct dans la salle d’accouchement, car c’était urgent. J’étais tellement fatiguée que je n’avais pas la force de pousser.

Une fois née, Chantal a été très sage, contrairement à sa sœur, elle pleurait très peu, heureusement !

Deux jours après sa naissance, Jean a perdu sa grand-mère, pendant que j’étais à la clinique, une grande peine pour lui qui l’adorait.

Le retour à la villa a été assez difficile, nous avons mis le lit de Chantal dans l’autre pièce, pour que Nelly ne la réveille pas !

Un jour, nous l’avons retrouvée sur le ventre, la tête dans l’oreiller, nous avons eu peur qu’elle s’étouffe, alors nous avons mis son lit dans notre chambre, nous étions un peu serrés, et ce fut le début des nuits blanches, car l’une réveillait l’autre et nous devions essayer de les rendormir, nous nous y mettions tous les deux, mais nous étions si fatigués que ça se terminait en disputes !

Heureusement, tout passe, petit à petit les filles se sont assagies.

L’été, cette petite villa était un paradis tranquille. Enfin, un paradis sans toilettes ni salle d’eau ; il fallait aller dans la remise, « la cabane au fond du jardin » !

Les filles pouvaient s’amuser dehors, elles avaient un petit jardin.

   

Jean jardinait avec mon père ; il y avait des légumes, des fruits, des poules, des lapins, des pigeons, et même des canards ….

Moi, je cousais pour toute la famille.

Mais l’hiver, c’était glacial, le vent pénétrait partout, pas d’isolation ! Comme chauffage, nous avions une cuisinière qu’on bourrait de charbon, elle devenait toute rouge dessus ; et pour la chambre nous avions un petit chauffage à gaz, mais nous ne pouvions pas le laisser marcher continuellement car ça sentait, ce n’était pas très bon pour la santé !

Le plus dur aussi, c’était la lessive. Il y avait bien un grand bassin dans la remise, mais l’eau était glaciale et quand on a deux bébés qu’il faut continuellement changer, il y avait une lessiveuse tous les jours, pas de couches à jeter, ni de machine à laver, tout ça était encore inconnu ! J’avais souvent l’onglée quand je devais étendre toutes ces couches avec le froid.

Quand revenaient les beaux jours, la vie était beaucoup plus agréable ; plein de fleurs, et des treilles de raisins partout !

Le dimanche, nous allions souvent déjeuner à la boulangerie.

Les filles ont grandi, et sont allées à l’école Lamartine, comme moi.

Elles ont fait leur rentrée la même année. Le premier jour, je les ai laissées dans la cour, se tenant par la main, je ne voulais pas voir le moment où on les séparerait !

J’allais les accompagner le matin, Francine allait les chercher à midi, et Jean passait les prendre en sortant du travail ; il les portait sur son vieux vélo : une sur le porte-bagage derrière, et il avait mis une petite selle devant sur le cadre, il les ramenait à deux heures et j’allais les rechercher à cinq heures. La vie était bien réglée !

Le jeudi, nous allions voir Mémé, la mère de Jean qui habitait à Saint-Martin, il ne fallait pas oublier, c’était immuable ; le trajet était assez long, mais nous y allions à pied.

A cette époque, Jean faisait parti de l’amicale des «anciens d’Al Sol », l’école où il avait appris la comptabilité, il était président de l’amicale.

Chaque année, nous faisions un grand bal, des sorties, et même un petit journal ; les réunions se passaient chez nous, nous formions un bon petit groupe. Les jours de sorties, maman nous gardait Nelly et Chantal !