Jo - Vy

L'Algérie de Jacky
Jo - Vy
 
Jo
1914, une bonne année ?
Yvette arrive
La SGS
La boxe
La SGS encore
Nice, le service militaire
Le temps des fiançailles
La guerre
Le trou
Faites bouchon !
Scandinaff ?
Les juifs, sortez des rangs !
Un train de la Shoah
A la table des paysans
Bois ce whisky
Le temps du retour
Les enfants arrivent
Yona, pas Jona
Le départ
 
Vy
Le temps explose
Les parents
L'enfance
Les fiançailles
Le mariage - la guerre
Les années bonheur
Le départ d'Algérie, l’exil
Les années retraite
Les années veuvage
L'artérite
 
Vous êtes sur
un site des Laskar&Co

Les enfants arrivent

Et la vie reprend. De plus en plus vite avec l’âge et le temps. En octobre 1946, un premier fils leur naît. Il s’appellera Jacob comme son grand-père, le père de Jona, ou il s’appellera plutôt Jacques. L’heure est à la francisation des prénoms. Après ce qui est arrivé aux juifs pendant la guerre, hein ? En mars 1950, un deuxième fils leur naît. Il s’appellera Chalom comme son grand-père, le père d’Yvette, ou il s’appellera plutôt Charles. L’heure est à la francisation des prénoms. Après ce qui est arrivé aux juifs pendant la guerre, hein ?

Ils habitent dans l’appartement des parents de Jona. Les deux frères de Jona n’ont pas trop d’argent. Edgard a deux enfants. Edouard n’est pas marié. Il est tailleur. Tous habiteront dans l’appartement commun. Une salle à manger commune, une chambre pour Jona et Yvette et les deux garçons, une chambre pour Edgard et Juliette et les deux enfants, une fille et un garçon, et une chambre pour Edouard qui devient atelier de tailleur la journée avec un coupeur et une repasseuse. Ca fait du monde, tout ça ! Mais que voulez-vous ? C’est l’après-guerre. Et on ne se plaint pas. L’après-guerre, c’est mieux que la guerre, non ?

Jona travaille toujours à la SGS. N’oubliez pas qu’il y restera jusqu’à sa retraite. Pendant la guerre, Yvette y avait été secrétaire. Ça lui a permis d’apporter des sous aux Laskar qui en avaient bien besoin et d’acheter des choses au marché noir (chut !) pour des colis à Jona. Qui n’arriveront pas tous, loin s’en faut, mais que voulez-vous ? L’important, c’est que ça profite à quelqu’un…

Les années passent. Edgard et Juliette ont emménagé chez eux. En 1957, Edouard se marie. Avec Emmanuelle. Manque de pot, Yvette accouche d’un troisième enfant le jour même. Une fille, cette fois. Michèle. Non, il faut l’appeler Marie, ordonne Mireille, qui continue à vouloir régenter la vie de ses frères. Elle est autoritaire, Mireille. Elle emmerde Yvette, Juliette et Emmanuelle qui entre-temps est devenue Manou. Il faut l’appeler Marie. Bon. On l’appellera Marie-Paule.

Et la deuxième guerre arrive. La guerre d’Algérie. Elle fait rage. Au début de la guerre, on rappela Jona sous les drapeaux. En Algérie. Comme auxiliaire de gendarmerie, cette fois. Mais bon. Après quelques semaines, Jona décréta que ça suffisait comme ça. Deux ans de service, un an de guerre, cinq ans de captivité. Huit ans, c’était bien. Ça suffisait. Le médecin de famille lui fit un certificat médical (réel en plus) comme quoi il avait attrapé la dysenterie. Il fut démobilisé. Définitivement. Ouf !

Les attentats, les bombes, les plastics, le FLN, l’OAS, l’armée… La bataille d’Alger, la révolte de Bab el Oued, les soldats sur la terrasse avec la mitrailleuse 12.7, la douze sept qu’on appelait la Doucette, les balles qui sifflent quand Jona essaie de regarder à travers les persiennes sans éteindre la lumière, « Quel idiot je fais ! ». Les lits dans le couloir pour dormir à l’abri. La guerre, quoi. Encore. Mais là, servie à domicile.

Et finalement, la déclaration de la future indépendance. Et finalement, le départ. Mais en règle, hein ? Quelques jours avant le départ, les avis d’imposition sont arrivés. Hein ? Ça vous étonne ? Que voulez-vous ? L’administration est une machine bien huilée. Les impôts sont prioritaires. Renseignez-vous. Pendant toutes les guerres, la seule organisation administrative qui n’ait jamais failli, c’est l’impôt !

Jona, consciencieux et honnête jusqu’au bout des ongles, va sur place, à l’Hôtel des Impôts (mais qui dort dans cet hôtel à part l’argent ?) s’acquitter de son devoir.
Le lendemain, l’Hôtel des Impôts explose par un plastic de l’OAS. Et brûle complètement. Edouard rigole de Jona. « Tu vois ? Tu as voulu payer tes impôts, maintenant ton chèque il a brûlé. Tu es tranquille. » Jona le regarde. « J’ai payé en liquide » Grande consternation. Mais avec le temps, cette histoire, elle amène plutôt un gros éclat de rire.

Voilà. La famille est arrivée à Marseille. Dur dur ! On avait proposé à Jona une belle situation, toujours à la SGS bien sûr. Oui. Mais à Rouen. Un mois passé là-bas lui suffit. La pluie. Le froid. Le gris dans le ciel. Berk ! Oui, mais à Marseille, il n’y avait pas de place pour lui. Faut dire qu’entre-temps, il était devenu à Alger sous-directeur fondé de pouvoir. Sous-Directeur Fondé de Pouvoir ! Il en était fier. Faut dire qu’en commençant garçon de course, il y avait de quoi. Oui, mais à Marseille où il choisit de rester, on le rétrograda. De poste et de salaire. Il resta cadre quand même. Ça, on ne pouvait pas lui enlever. La direction de Marseille, en plus d’être antisémite, n’aimait pas les Pieds Noirs. Alors, on comprend comme il a été accueilli.

Alors il était affecté à toutes les missions dont personne ne voulait. Des journées à Lavera… Des semaines à Port La Nouvelle… Oui, vraiment, une dure période. Et longue, avec ça. Quand le directeur prit sa retraite, c’est son fils qui lui succéda. Pire encore ! Et puis, arriva le moment où la direction changea de nouveau et son ancien directeur d’Alger fut son dernier directeur. Le bonheur enfin ! En fin de carrière !

 

 

Dalida - Come prima