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Le chaos s'installe...

 

Les évènements sont prévus pour s'enchaîner comme ça les uns aux autres, jusqu'à ce que la tragédie se profile à l'horizon du destin, devenant inéluctable, et le moment arrive où elle s'abat dans toute sa cruauté, tout comme dans une tragédie qu'aurait pu écrire Sophocle lui-même...

Impossible désormais de vous raconter ces souvenirs comme je l'ai fait jusqu'à présent, en désordre et comme ils venaient, vous seriez incapables de vous retrouver dans ce qui fut la fin de l'algérie française.

J'adopterai dons désormais pour ce dernier chapitre, pour votre confort cérébral et pour le mien aussi, le mode chronologique. On a rien prévu de mieux pour raconter l'histoire.

 

Départ d'Alger du gouverneur Jacques Soustelle

En préalable, pour bien vous mettre dans l'ambiance, je me dois de vous préciser que les manifestations de là-bas n'avaient rien à voir avec celles d'aujourd'hui, où, quand la CGT par exemple a réussi à faire défiler 20 000 personnes (5 000) selon la police, on se gargarise d'un franc succès ...et tout ..et tout !

Chez nous c'étaient minimum 200 000 personnes, et on n'osait parler de succès que si on avait abouti, sinon à quoi bon avoir amassé tout ce monde, j'vous le demande ?

Aussi loin que je puisse remonter en arrière, je me souviens du départ de Jacques Soustelle, le 2 Février 1956 :

200 000 personnes massées tout le long de son parcours, dans sa voiture au fanion de Gouverneur de l'Algérie, pour un dernier jour, sur un simple mot d'ordre lancé de bouche à oreille. Sa politique de fermeté vis-àvis du FLN, accompagnée de l'intégration de tous les indigènes à la France ne convenait plus à la mollesse du Président du conseil Guy Mollet (nom prédestiné en quelque sorte...)

C'est fou ce que se mot intégration a toujous fichu la trouille à ces gens de la métropole, alors qu'aujourd'hui, mais c'est trop tard, ils donneraient cher pour réussir celle de leurs territoires perdus !


Le départ de Jacques Soustelle

Et voilà que plus de la moitié des 200 000 personnes qui avait assisté à son passage se rue alors vers le port pour empêcher son départ pour la métropole. Pour lui faire atteindre la passerelle d'embarquement, on dut le cacher dans le coffre d'une voiture, pour ne l'en extirper que dans un endroit sûr d'où il fut accroché directement sur un palan de grue, protégé de la foule. Il fut directement déposé sur le pont de son bateau, qui avait déjà largué ses amarres et pris 20 m de large par rapport au quai.

Bref, 200 000 personnes amassées en vain. Ce fut considéré comme un échec...

 

Le 13 Mai 1958

Les manifestations se sont succédées depuis des mois pour s'opposer aux tergiversations politiques de cette IVème république, dans tous ses échecs à pouvoir faire émerger un cabinet capable de gouverner et d'appliquer enfin une véritable résistance à la révolution nationaliste arabe qui prenait de plus en plus de vigueur.

Tous au forum !

La dernière manif mena la foule au Gouvernement Général et tourna bien vite à l'émeute. Trouvant les portes de fer solidement verrouillées, les manifestants jetèrent des grappins qui s'accrochèrent aux différents balcons. Les plus vigoureux grimpèrent rapidement aux cordes, atteignant les fenêtres des bureaux, lesquels furent saccagés, dossiers, secrets ou pas, et machines à écrire jetés par les balcons.


Proclamation du Comité de salut public

L'émeute tourna à l'insurrection, et Soustelle réapparut à Alger où, en compagnie du général Salan, il proclama la fondation d'un Comité de Salut Public qui ne tarda pas à faire appel à De Gaulle, lequel ne se fit pas beaucoup prier...

Début Juin, celui-ci fit son apparition à Alger, déjà investi par René Coty pour un gouvernement provisoire...

Plus de 100 000 personnes massées sur son parcours, des milliers de confettis lancés de tous les balcons, plus 300 000 personnes agglutinées sur le forum, il y en avait partout, sur chaque promontoire, sur chaque escalier, sur chaque arbre sur chaque lampadaire. Véridique, j'y ai assisté moi-même juché sur les épaules de Papa.

Les chants et les cris s'arrêtèrent soudain et un gigantesque bruissement presque silencieux se mit à planer sur la foule.

Impressionnant !

Enfin il se mit à parler, lançant son historique "Je vous ai compris !". Ce fut le délire...."j'ai vu ce qui s'est passé ici". Nouveau délire...;


Je vous ai compris

La suite hélas ne fit qu'engendrer déception sur déception, on vit De Gaulle faire un virage à 180 degrés dans sa politique algérienne, je vous ai expliqué déjà pourquoi etc...etc....

 

Les barricades

Les manifestations s'étaient succédées à Alger, à chaque fois que le Chef de l'Etat confirmait davantage à chaque discours sa politique d'autodétermination.

La dernière celle du 24 Janvier 1960, après que de gaulle eut lancé à la télé son projet de "paix des braves", tourna à l'émeute... Celle-ci, particulièrement violente, vit la foule se saisir de matériaux de toutes sortes et détacher les pavés d'une bonne partie de la rue Michelet, afin d'ériger de grandes barricades qui constituèrent un véritable fortin.


Les barricades

Dès les premiers jours, les insurgés comptaient bien infléchir la politique de la capitale, forts de l'expérience du 13 Mai où les Algérois avaient réussi à faire tomber la IVème république. Cette fois-ci l'opinion de la Métropole ne les suivrait pas, et ce fut toute la différence. Dès qu'on eut parlé de paix en algérie, les Français entrevirent l'espoir de n'avoir plus à envoyer leur fils dans le Djebel, se battre pour une cause qui n'était pas la leur.

Une fusillade sanglante éclata alors qui mit fin à l'insurrection.

C'est alors que De Gaulle mit en oeuvre sa nouvelle politique et que dans le plus grand secret, les chefs de certaines Willayas, pas toutes, se rendirent aux entrevues organisées contre fournitures d'équipements et d'armes, les combattants du FLN trouvant là une bonne occasion de se ravitailler, alors qu'ils manquaient de tout. Les autres Willayas n'ayant jamais voulu suivre, il s'ensuivit une épuration en règle de tous les traitres impliqués.

Néanmoins la volonté d'une paix en Algérie continuait inéxorablement à faire son chemin... On vit Massu être appelé en Allemagne à d'autres fonctions, dans le cadre des forces d'occupation. Quant à Bigeard, il fut nommé commandant en chef des troupes aéroportées du 6ème RIAOM en ....République Centrafricaine. La place vidée de ses éventuels gêneurs, toute la suite était déjà orchestrée...

 

Le Putsch d'Alger

Le 21 Avril 1961, Alger se réveille entièrement quadrillée par les paras du 1er REP, du commandant Hélie de saint Marc.

Dans la nuit précédente, tous les points névralgiques de la ville avaient été investis.

Radio Alger appelait tous les habitants à se rendre au forum, dans un message bref, répété toutes les cinq minutes qui entrecoupait à chaque fois la diffusion de marches militaires.

Papa se trouvait à Marseille, Maman se morfondait, inquiète...

300 000 personne se massèrent devant le Gouvernement Général, pour acclamer les généraux Salan, Jouhaud, Challe et Zeller, après qu'ils eurent proclamé un putsch militaire destiné à faire destituer De Gaulle et en finir avec sa politique d'abandon des Pieds Noirs et des Harkis. L'honneur et les serments de tous les officiers ayant servi ou servant en Algérie étaient en jeu...

L'espoir renaissait à nouveau dans la population...


Le Putsch à Alger

De Gaulle, dans l'affolement de la capitale qui redoutait un parachutage des paras d'Alger sur leur ville, apparut à la télévision en tenue militaire, dénonçant un "quarteron de généraux en retraite assoiffés de pouvoir" etc...

A cette époque, chaque soldat du contingent possédait son propre poste à transistors grâce auquel il restait en liaison avec la métropole quand il n'était pas en mission. L'oreille collée à leur poste dans leur casernement, l'impact de ce discours en direct fut considérable. Les soldats du général Ailleret refusèrent de quitter leurs cantonnements, malgré toutes les invitations officielles à rejoindre le putsch, tandis que la marine nationale commandée par l'amiral Philippe de Gaulle, restait évidemment fidèle au pouvoir en place. Vous n'auriez jamais pu imaginer la flotte toulonnaise immobilisée au large d'Alger pilonnant la ville, et bien pourtant l'ordre en fut donné, "pour le cas où les insurgés auraient persisté dans leur folie", tant l'orgueil et la détermintion de l'homme au pouvoir étaient immenses.

Quoi qu'il en fût, il n'aurait jamais été question pour les insurgés de déclancher de quelque façon une guerre franco-française, refusant jusqu'au bout d'armer les civils...
Il fallut se rendre à l'évidence, le putsch était raté...

Challe et Zeller se rendirent, Jouhaud entra dans la clandestinité hébergé quelque part dans une ferme de la Mitidja, quant à Salan, il partit se réfugier en Espagne jeter les premières bases de l'OAS. Le 24 Avril 1961 au soir, Radio Alger ayant sonné le glas de l'insurrection, les Algérois virent en pleurant à leur balcon passer les premiers blindés de la gendarmerie sortis de leur casernement...

Hélie de Saint Marc se rendit avec tout son régiment, quant au 1er REP, il fut à jamais dissous.

Il fut jugé et écroué à la prison de la Santé pour haute trahison, et ses paras furent considérés comme déserteurs par les tribunaux militaires.

Le sort de l'algérie était désormais scellé...

 

Un duel à trois contre un

  • L'OAS, avec Salan à sa tête, entra rapidement en scène, avec son quotidien de plasticages et d'attentats. Les Pieds Noirs avaient perdu tout autre moyen de se faire entendre, et toute la mise en oeuvre d'une nouvelle Algérie se faisait sans eux...
  • Le FLN quant à lui, conforté par la politique gaulliste, il se mit rapidement à renaître de ses cendres et retrouver une vigueur depuis longtemps perdue...
  • Les premiers commandos barbouzes, débarqués à Alger depuis Novembre 1960, s'étaient maintenant parfaitement organisés pour être enfin opérationnels dans leur mission d'écraser l'OAS. Ils avaient recruté parmi la pègre française et les Vietnamiens spécialistes de la torture, prêts à leur obscur combat. Avec un statut de police parallèle qui n'avait de compte à rendre qu'à leur chef, entre autres un certain Bitterlin, ils avaient tous les pouvoirs pour débarrasser De Gaulle des Pieds Noirds qui se mettraient sur son chemin: enlèvements, tortures, assassinats, dynamitages, tout leur fut pemis.
  • La Gendarmerie Mobile enfin qui servait de bras armé officiel du pouvoir avec ses perquisitions, arrestations, ... et surtout qui fut l'élément essentiel du siège de Bab el Oued dont je parlerai plus loin.

Ainsi fut-il permis aux barbouzes en toute impunité de tisser certaines alliances avec le FLN: contre la fourniture de certaines armes, les terroristes arabes, qui avaient complètement restructuré leur réseau urbain, se mirent à leur livrer de précieux renseignements en vue d'écraser plus rapidement l'ennemi commun.

Confortés dans leur situation, les meneurs du FLN organisèrent à plusieurs reprises des manifestations de masse, au cours desquelles la population de la Casbah descendait vers les quartiers dits français se livrer à toute sortes d'exactions, voire à égorger quelques européens qui avaient eu le malheur de se trouver sur leur passage... Tant la résistance des militaires français était devenue molle et impuissante...

Fini le temps des Paras...

J'avoue quant à moi que lorsqu'on entendait les femmes pousser leurs youh youh depuis la rampe vallée, en accompagnant les hommes vers Nelson et Bab el Oued, ça foutait la trouille !

Une fois une mitrailleuse de l'OAS, depuis un toit, les a tous pris en enfilade avant qu'ils n'atteignent les escaliers de l'avenue de la Marne, une autre près du cimetière d'El Kétar juste au-dessus de Bab el Oued.

On fut soulagé, car personne d'autre à l'horizon pour nous défendre...

Leurs tueurs aussi ne tardèrent pas à reprendre leurs attentats contre les civils.

C'est ainsi que le lendemain de Yom Kippour 1961, le 21 Septembre, le FLN organisa la liquidation de tous les commerçants juifs de la rue de la Lyre, histoire de leur faire regretter d'avoir pris position pour l'Algérie française, et aussi à titre d'exemple pour tous les arabes qui par hasard auraient voulu en faire autant.
Sept victimes à déplorer, les autres avaient coutume de respecter la fête des Cohanim, sinon le bilan aurait été triplé...

Parmi les victimes, Henri Saada, celui-là même qui allait devenir mon regretté méconnu Beau-Père, en tous les cas pas inconnu, tant Edith a pu me raconter tous les bienfaits de cet excellent homme au cours de toute sa vie !

Dans le mot guérilla, il y a guerre, petite certes, mais guerre quand même. Dans une guerre vous avez un uniforme, et vous vous battez contre des gens qui ont aussi un uniforme et qui sont déjà une menace pour vous. Mais là, voilà que vous vous trouvez soudain plongé dans cette guerre unilatérale, sans qu'on ait quoi que ce soit à vous reprocher, ni vol, ni crime, ni exaction aucune, ni même une menace à quiconque...

Le matin, vous vous êtes levé d'un bon pied, vous vous êtes préparé de bonne humeur, vous avez pris vite fait un petit déjeuner et vous avez dit au revoir à votre femme et à vos enfants, prêt à aller travailler...

Devant votre devanture, vous vous apprêtez à en lever le rideau ...Vous n'avez pas vu qu'un tueur, le mot est juste, est posté juste derriere vous, caché par un pilier...Au moment où vous vous baissez pour enfoncer la clé dans la serrure il est sur vous... Pas même le courage de se présenter de face ...

Vous vous écroulez, sans même avoir compris ce qui vous arrivait !

 

Il ya des êtres qu'on ne comprendra jamais...

Du côté barbouzes, fort des renseignements obtenus, on se mit à enlever de plus belle et emmener aux différents QG de plus en plus d'activistes ou même de simples sympathisants. On torture pendant des jours, on supprime, on exécute...

Une nouvelle activité consista aussi à dynamiter pendant le couvre feu tous les bars de la ville fréquentés par des membres de l'OAS.

Je dis dynamiter, parce que pour eux le plastic ne faisait que souffler la cible, or il leur fallait quelque chose de beaucoup plus destructeur...


villa Andréa à El Biar

Il leur fut néanmoins rendu coup pour coup, et dès qu'un de leur QG était repéré, il était aussitôt quasiment rasé, les survivants mitraillés.Tel fut le sort réservé à une villa de la Redoute, banlieue Est d'Alger, tout comme le coup de maître réalisé pour la villa Andréa à El Biar, où avait été livrée un énorme caisse, piégée de 100 kgs de plastic.

 

 

 

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